Au plus figuratif, les traces d’un paysage urbain. La rue ou son reflet. Un gaillard casquette de base-ball bien fixée. Un atelier embrasé par des lumières chaudes. La vie ou son reflet. La fusion d’une photographie noir et blanc et d’une vision colorée capture d’abord le regard, puis guide l’émotion aux confins du rêve et du souvenir. Le souvenir ou son reflet. Au plus abstrait, des trajectoires colorées, des éclats, des explosions, des fulgurances. L’émotion ou son reflet. La peinture de Michel de Mingo montre et suggère, entre le souvenir et le rêve. Le vu et le désiré.
New York. New York. New York USA, chantait le poète. Sur ce refrain, le geste de Michel de Mingo donne à sa peinture un rythme, provoque un balancement du trait qui ouvre sur un jeu de passe-passe entre le montré et le caché. Par couches successives, il avance dans la construction de son propos, il affirme le sens et travaille la matière. Le point d’arrêt est, dit-il, ce point où la toile « fonctionne », où elle peut trouver sa place dans son espace familier. J’entends et je vois ce moment où, apprivoisée, apaisée, la création n’est plus une question mais une réponse. Pour un temps, un moment. Juste pour un moment, un apaisement. Les reprises ne sont pas des repentis, ni des améliorations techniques ou esthétiques, mais plutôt des négociations au cours desquelles le sujet et le peintre se donnent à voir et s’enjoignent à cacher. On peut pour chaque toile se demander qui a dominé l’autre. Peut être aucun, comme dans ce grand carré bleu dans lequel les lumières sont à l’équilibre entre quiétude et mystère.
Il peut advenir qu’au terme du travail une image soit ce qu’elle doit être et cependant soit insupportable, inopportune. Image nécessaire puisqu’elle est là, à l’évidence achevée. Mais image avec laquelle la vie ne peut composer. Comme un souvenir, Michel de Mingo la refoule. Il l’enfouit sous les couleurs, la superposition de formes et de structures. Le travail sensible peut être si fort que l’œuvre bien que toujours la même se métamorphose radicalement. Aussi étrangère que le papillon à la chenille, elle est la chenille encore dont on perçoit le frissonnement sous la peinture.
Michel de Mingo expose à l’atelier Clara Bergel jusqu’au 25 mars 2010
Illustrations (courtoisie de l’artiste) : (1) Fish market, 2005 — technique mixte ; (2) After ten, 2009 — huile sur toile ; (3) Vers d’autres frontières, 2004 — technique mixte.
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